Lettre pastorale



Télécharger PDF
2013-02-17

 Lettre pastorale

‘La grâce nous grandit,
le service nous élève,
l’amour nous unit’





Par la grâce de Dieu
Youhanna X
Patriarche d’Antioche et de tout l’Orient
des grec-orthodoxes
à tous les bien-aimés dans le Seigneur
les fidèles, clercs et laïcs,
du Saint Siège d’Antioche



Table de matières


Introduction
1.    Le service de la Parole de Dieu
2.    Le service de louange
3.    Nos institutions sont une main tendue au prochain pour le  servir
4.    Vers un sacerdoce responsable
5.    Amour et Pastorale
a-    Catéchèse et développement de l’éveil à la foi
b-    Pastorale des jeunes
c-    Pastorale de la femme
d-    Pastorale de la famille
e-    Pastorale des pauvres
f-    Pastorale des handicapés
g-    Connaître le vécu de nos fidèles pour mieux nous en occuper
6.    Développer la vie monastique
7.    Notre patriarcat d’Antioche est un et unifié
8.    Le monde orthodoxe contemporain
9.    Vers une union sacramentelle complète avec les autres chrétiens
10.    Dialogue des Religions
11.    Présence responsable envers l’homme et  la société
12.    Assumer les problèmes de la terre

‘La construction que vous êtes a pour fondation les apôtres et les prophètes et pour pierre d’angle le Christ Jésus lui-même’ (Ephésiens 2 : 20-21).

Bien-aimés,
Il m’est agréable de vous adresser cette lettre pour vous faire part de certaines de mes préoccupations relatives aux besoins de notre Eglise aujourd’hui et de ce que je pense être requis de chacun d’entre nous. Je ne voudrais que l’expression :

‘La grâce nous grandit,
le service nous élève,
l’amour nous unit’

soit la devise de mon ministère sur le Siège d’Antioche, dont Dieu m’a donné la charge, me   confiant  la responsabilité de veiller sur ses fidèles, avec mes frères, les évêques. Cette Eglise d’Antioche est notre Eglise à tous. Dieu veut que nous soyons des frères travaillant, en son sein, comme les membres d’un même corps. Je sais que nombreux parmi vous se plaignent de ne pas entendre assez la voix de leur Eglise. Ils s’imaginent alors qu’elle les oublie et ne s’intéresse pas à leurs vrais problèmes. Par contre, d’autres s’attristent de l’indifférence affichée envers l’Eglise et ses préoccupations par certains. Je comprends tous ces griefs. Je souffre pour tous ceux qui se sont éloignés du troupeau du Christ, pour cause de négligence, d’orgueil, de paresse, d’un manque de transparence ou d’attention. Je désire sincèrement que nous portions ensemble la responsabilité de cette Eglise qui, selon le dire du Chrysostome, est notre responsabilité commune. Nous l’assumerons véritablement dans la mesure où nous respecterons nos charismes respectifs et complémentaires et joindrons nos efforts pour nous occuper de tout ce qui touche notre Eglise.
Pour s’occuper de ce qui touche à sa famille, l’homme doit bien la connaître, et espérer qu’elle prenne en compte ses préoccupations et ses difficultés. Nous avons donc à inventer des moyens pour nous aider à nous écouter les uns les autres pour mieux planifier et pour avoir une meilleure pastorale.
Grâce aux efforts de mon prédécesseur de bienheureuse mémoire, le Patriarche Ignace IV, notre Eglise a vécu récemment de grandes réalisations, que l’Esprit nous a permis d’entreprendre, avec l’apport apprécié d’un certain nombre de nos frères. Nous avons maintenant la responsabilité de ces réalisations et veillerons  à les développer et les rendre encore plus prêtes, dans une communion d’amour, à se mettre au service de tous nos fidèles et des frères qui vivent avec nous sur cette terre bénie.
Afin d’enlever ‘toute souillure’ de la face de l’épouse du Christ, notre Eglise, nous aurons à cœur d’encourager la concertation et la mise en commun et de donner à chacun l’opportunité d’exprimer son opinion et ses propositions constructives. Par la communion entre tous, l’Eglise deviendra telle que  son Maître et Seigneur l’a voulue, et elle reflètera Son visage glorieux. Une Eglise humble, aimante, orientée vers le service de tous ses enfants, aura une pastorale réfléchie, ouverte, attentive aux interpellations de ce monde et à la situation difficile que nous vivons.  Seule une telle pastorale permettra au monde de réaliser que le Seigneur l’aime d’un grand amour.
Ce livret, que je mets entre vos mains, ne représente qu’un premier pas sur le long chemin que nous avons à parcourir ensemble, mettant les possibilités de chacun au service de tous, agissant en commun pour servir aussi cette société où Dieu a voulu que nous soyons  Ses témoins et ceux de Son amour. Vous y trouverez les lignes directrices de l’action que j’envisage d’entreprendre avec vous, pour ajuster toute déviation et conforter toute rectitude dans le parcours de cette Eglise, que Jésus nous a confié pour qu’elle devienne réellement la conscience du monde. Ce ne sont là que des lignes générales et des têtes de chapitres. Nous nous efforcerons de les développer, dans un proche avenir, avec votre aide, pour les traduire en actions pour la gloire de Dieu, et pour affermir l’amour qui nous lie en Lui.

1-Le service de la Parole de Dieu
Le Seigneur a dit : ‘Je suis né et suis venu en ce monde pour rendre témoignage à la vérité‘ (Jean 18 : 37).  Il nous a aussi dit : ‘Vous serez mes témoins’ (Actes 1 : 8). Nous sommes donc appelés à être les témoins de la Vérité, qui est le Seigneur Jésus-Christ. Nous le serons par la garde de Ses commandements, car Il a dit : ‘Celui qui m’aime garde mes commandements’ (Jean 14 : 16). La transmission de la Bonne Nouvelle est au cœur de la mission de l’Eglise dont le but est de porter la Parole à toute l’humanité et d’œuvrer à son renouveau.
Témoigner de la Parole et la servir ne consiste pas à regarder vers le passé, ni à se gargariser des gloires d’antan, ni à s’attacher aveuglément à une tradition  qui ne nous parle plus. Le véritable témoignage consiste à chercher les moyens pour faire participer l’humanité à la grâce divine, c’est-à-dire à considérer la Tradition d’une façon dynamique et vivante. Nous devons réfléchir sérieusement aux moyens par lesquels l’Eglise pourra mieux faire entendre sa voix à notre époque, tellement imbue de sa science et de ses réalisations. Il s’agit de trouver comment elle doit entrer en dialogue avec les hommes pour les convier au salut. Et comment garder ses fidèles ancrés dans le mystère du salut.
Pour bien remplir son rôle dans la société, le chrétien doit accepter cette société et l’aimer, malgré ce qu’il y trouve de dangereux, malsain ou corrompu qui le choque.
    Pour servir vraiment la Parole de Dieu, nous devons témoigner de notre foi dans une langue accessible à notre époque et ses moyens technologiques d’expression. Nous devons utiliser les moyens techniques que met à notre disposition la société, au risque de lui devenir complètement étrangers, et ne plus être compris même par nos propres fidèles qui sont imprégnés de son esprit. Pourquoi ne pas utiliser les réseaux sociaux pour y annoncer la Parole et nous faire entendre d’un plus grand nombre ? Ces réseaux ont fait du monde un grand village, avec l’élimination des frontières géographiques entre les pays et les cultures. Les moyens modernes de communication sont susceptibles de porter l’Evangile aux hommes, comme ils peuvent les en éloigner. Il ne faut pas en avoir peur, parce qu’ils ont envahi nos maisons. Ils ont une grande prise sur l’esprit de nos enfants. Il nous faut donc les aborder positivement et veiller à nous prémunir contre leurs dangers. Nous travaillerons avec des spécialistes  en vue de fonder un centre d’informations adéquat, afin que notre ministère de la Parole soit ouvert au dialogue et à la communication, en conformité à l’invite de l’Apôtre Pierre, dans son sermon, le jour de la Pentecôte. Toutefois, il faut veiller à ce que notre information ne soit pas concentrée sur nous-mêmes, mais sur l’amour que Dieu a pour le monde, auquel les anges ont annoncé la paix qui vient d’en haut.
Au milieu de l’énorme diversité du monde contemporain, nous devons continuer à affirmer notre identité et à faire entendre notre voix. Le Saint Esprit est toujours dans l’Eglise, selon la promesse du Christ (Jean 14 : 17). Il y agit en permanence et donne à ses membres les dons de la Pentecôte et les invite à en vivre. Pour que l’Eglise puisse remplir véritablement son rôle dans l’éducation et l’information, servir les fidèles et veiller à leur développement spirituel, il lui faut transmettre, non seulement les données du savoir, mais aussi des expériences de sainteté, sans les séparer ou les opposer,
Transmettre l’Evangile, en particulier aux enfants et aux jeunes, est une préoccupation majeure qui requière, aujourd’hui, notre attention et des efforts spéciaux. Des centres culturels, des foyers et clubs d’Eglise, des publications écrites et vocales, seront encouragés. Associés aux moyens traditionnels  et modernes d’information et de communication, ils nous aideront à accomplir au mieux notre mission catéchétique. Nous pourrons servir encore plus la Parole de Dieu dans toutes nos activités ecclésiales et promouvoir le dialogue, entre les membres de l’Eglise et avec le monde extérieur. Nous inviterons ainsi nos fidèles et le monde à un renouveau spirituel et ferons parvenir, selon nos possibilités, la Bonne Nouvelle à tout homme, en conformité avec la parole de l’Ecriture : ‘Leur retentissement parcourt toute la terre et leurs accents vont aux extrémités du monde’(Psaume 18 : 5).
Ce renouveau spirituel nous enjoint de ne pas faire fi des sciences, des arts, de la littérature et de l’ensemble des apports culturels, car l’expérience spirituelle grandit avec la connaissanceet se rend encore plus utile. Dieu a aimé le monde comme il était et Il l’aime comme il est maintenant. Les enfants de Dieu que nous sommes doivent donc aimer le monde, le servir et y semer la Parole de Dieu, en utilisant tous les moyens à leur disposition.

2- Le service de louange
‘Recherchez votre plénitude en récitant entre vous des psaumes, des hymnes et des cantiques inspirés, en chantant et célébrant le Seigneur de tout votre cœur’(Ephésiens 5 : 19).
La Liturgie, en tant que cri de la créature envers son Créateur, est le lieu où nos saints Pères ont exprimé par excellence la entre des fils et leur Père céleste. Ils y ont aussi exprimé l’orthodoxie de leur foi. Ils ont vécu cette expérience et en ont parlé, dans un élan poétique, avec des mots tissés des fruits de leurs combats ascétiques. Il en a résulté une prière qui reflète toute la vie de l’Eglise, dans son histoire et sa théologie. Nous ne pouvons découvrir la profondeur et la douceur de cette Liturgie qu’en la vivant.
Elle n’est pas une chose inerte qu’on répète machinalement. Elle exprime le besoin des hommes de parler à leur Seigneur et à le remercier pour Ses grâces. Elle est donc remplie d’un esprit et d’une vie qui irriguent le corps ecclésial et nourrissent chacun de ses membres. Par la grâce de Dieu dont elle est gratifiée, elle vivifie l’Eglise, les fidèles et leur communauté.
Nous réalisons, en la vivant, qu’elle un joyau précieux, que nous avons le devoir de polir pour en faire jaillir la brillance, sans pour cela toucher à son essence et aux horizons infinis  qu’elle ouvre  aux fidèles pour croitre en Christ. Il nous faut donc faire preuve d’innovations pour que le peuple puisse mieux scruter les profondeurs de cette Liturgie inspirée et inspirante,  y puiser une meilleure approche du mystère de Dieu utile à son salut .
Nous savons l’importance qu’ont les célébrations liturgiques et les mystères sacramentaux dans la vie de nos paroisses. Nous sommes aussi conscients combien il est important de les rendre plus accessibles, d’en unifier les rites et de développer le chant liturgique. Notre vie liturgique sera ainsi plus adaptée à la réalité pastorale. Prendre en compte l’aspect pastoral de la Liturgie encouragera l’éveil religieux et approfondira la relation de la créature avec son Créateur. Les mots de la Liturgie seront plus compréhensibles, les rubriques prendront en considération les particularités de chaque paroisse et la nécessité de continuer à sanctifier le temps dans un monde, où les critères qui ont fixé autrefois l’ordo liturgique, ont changé. Cet effort d’adaptation en vue d’une meilleure pastorale devra s’étendre aux célébrations de tous les sacrements, pour en faire des centres importants de la vie de la communauté, non seulement des occasions de piété personnelles.

3- Nos institutions sont une main tendue au prochain pour le  servir
Nos institutions sont la propriété de l’Eglise, donc des fidèles. Elles existent pour leur bien commun, non pour des besoins personnels ou particuliers. Elles font partie de la vigne du Seigneur qui a dit, dans l’Evangile : ‘Mon enfant, va aujourd’hui travailler dans ma vigne’ (Matthieu 21 : 28). Ces réalisations bénies ont pour but le service de ceux d’entre nous qui ont besoin d’assistance. Elles sont au service de nos jeunes qui veulent se construire un avenir. Elles sont au service de nos vieillards pour y passer le restant de leur vie dans la joie et la sérénité. Elles sont au service de nos orphelins pour qu’ils grandissent dans un climat d’affection, de tendresse et de stabilité. Fructifier nos institutions ne se fera pas en vue d’un gain matériel ou dans le seul but d’un développement économique, mais dans un but spirituel, celui d’aider le prochain.
De nos jours, beaucoup plus qu’autrefois, la personne humaine se trouve sous l’emprise de crises et d’intérêts économiques. Elle est interpellée par les conflits de ce monde et le développement technologique. L’homme y est considéré comme un dieu, plutôt qu’une personne. Cette situation rend l’effort spirituel plus ardu. Elle  crée d’innombrables  problèmes éthiques. La vie en société devient essentiellement individualiste.
Nous devons prôner une  autre vision de l’utilisation des biens de ce monde, et une meilleure approche de ses problèmes, par l’exemple vécu. Par la rectitude et la transparence de la gestion des biens et des legs du Patriarcat, partout où ils se trouvent. Par leur fructification pour le service des autres, toujours en accord avec la vision ecclésiale et le bien de la société. Il faut aussi veiller strictement à ne pas en disposer que dans les limites permises par nos lois ecclésiales.
Chacune de nos institutions, quelle qu’en soit la taille ou la nature, scolaire, éducative, hospitalière, sociale ou de bienfaisance, devra avoir une vision claire de sa diaconie. Elle devra définir clairement le but de sa présence et planifier pour atteindre ce but. Elles reflèteront alors la lumière divine qui doit les habiter. Elles devront  solliciter l’apport de spécialistes, procéder à de larges consultations, faire des recherches sérieuses, s’informer, avant de tout  intégrer dans un planning et un programme  au service de tous. Elles doivent faire leur les paroles de l’Apôtre : ‘Prenez bien garde à votre conduite. Qu’elle soit celle de sages et non d’insensés’(Ephésiens 5 : 12).



4- Vers un sacerdoce responsable
L’homme ne mérite pas la dignité du sacerdoce. Dieu l’en gratifie par amour. Le sacerdoce est un appel divin auquel des hommes, conscients de leur indignité,  répondent en fructifiant les charismes que Dieu leur donne. Leur réponse consiste en un engagement existentiel à servir le peuple de Dieu, à propager la foi, à ne pas mesurer ses efforts, à toujours vivre dans l’amour et se munir de la patience qui vient de l’espérance.
Il s’agit donc de préparer des pasteurs remplis d’amour, toujours prêts au service et à un engagement qui sied à la grandeur de l’appel divin. Une bonne préparation au sacerdoce est la condition d’une bonne diaconie. A cet égard, le rôle de l’Institut de théologie saint Jean Damascène est primordial. Mais, il ne faut pas croire que la préparation au sacerdoce se limite à une connaissance théologique théorique. Nous envisageons la création d’organes pour préparer pratiquement à la pastorale pour acquérir l’expérience pour mener à bien le ministère de nos prêtres, suivre leur parcours, les aider à mieux remplir leur mission et leur assurer les moyens d’une vie dans la dignité. Nous les encouragerons ainsi à donner plus de temps et à se consacrer plus totalement au Seigneur, au service de Son saint autel et de l’autel du prochain.
L’apport et l’assistance des fidèles doivent se jumeler aux efforts du pasteur, car tous forment le peuple charismatique de Dieu et un corps où ils se complètent. Le pasteur se sacrifiera pour ceux dont il a la charge. Eux mettront leur potentiel à collaborer avec lui et à le prendre en charge. Alors, et seulement alors, ils manifesteront la face du Christ, du fait de leur amour réciproque. Ceux qui verront leurs bonnes œuvres, glorifieront Notre Père qui est aux cieux, car ils auront rencontré de vrais témoins du Christ.

5- Amour et Pastorale
‘Car vous êtes notre gloire et notre joie’ (1 Thessaloniciens 2 : 20).
‘M'aimes-tu ?… Pierre lui répondit: Seigneur, tu sais toutes choses, tu sais que je t'aime. Jésus lui dit: Pais mes brebis’(Jean 21 : 17). Comme Il l’a fait avec l’Apôtre Pierre, le Seigneur pose la même question à chacun d’entre nous : ‘Mon fils, m’aimes-tu ?’. Il se tient à la porte de notre cœur, attendant la réponse de notre amour. Allons-nous lui répondre ? Ou allons-nous ne pas lui ouvrir, à cause des multiples préoccupations et des salissures qui encombrent la maison de notre âme ? Mais, si plutôt nous ouvrons en disant: ‘Oui, nous T’aimons. Mais, viens en aide à notre manque d’amour’, Il dira forcément à chacun d’entre nous: ‘Pais mes brebis’. Le Seigneur nous apprend donc qu’il n’y a pas de pastorale sans amour, que l’amour vient en premier, car la vie chrétienne est une histoire d’amour. Même la foi vient de l’amour. Il en est sa marque. De l’amour viennent aussi toutes les vertus. Comme disent nos Pères, l’amour est plus grand que la connaissance et même plus grand que la prière. Qui aime se dévoue et sert ceux qu’il aime. Il respecte leurs charismes et leurs talents. L’amour pose donc les critères d’une bonne pastorale, à l’image du seul bon pasteur qui a donné sa vie pour ses brebis. Vivre dans l’amour suppose une nécessaire imitation du Christ, un comportement identique au Sien, par la garde de Ses commandements et l’assiduité à ‘l’enseignement des apôtres’ et la fidélité ’à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières’ (Actes 2 : 42). C’est ce genre de pastorale que nous devons réaliser dans notre milieu ecclésial. Les pasteurs doivent vivre de la sorte, encourageant la collaboration entre clercs et laïcs, au sein des organes de service commun, prévus par nos lois et constitutions qu’il nous faut appliquer à tous prix, pour une meilleure communion et une meilleure diaconie.
a-    Catéchèse et développement de l’éveil à la foi
Nous devons encourager et conforter tous ceux, clercs et laïcs, qui travaillent à la transmission du flambeau de la foi aux nouvelles générations, ainsi qu’à toutes les tranches d’âge. Il nous faut leur rappeler qu’ils doivent transmettre le Christ, non simplement en rappelant Ses enseignements, mais par leur propre vie, non seulement par leurs paroles. Jésus lui-même, qui est le ‘chemin’, nous indique les voies qui mènent à Lui. La longue expérience de l’Eglise nous indique les endroits où nous pouvons Le trouver. Il n’est guère possible de nous engager sur ces voies sans repentance, sans changement de vie, sans participation réfléchie aux saints Mystères, sans rencontre existentielle avec la Parole de Dieu dans Son Livre saint, sans attention soutenue à la commémoration de Son nom dans la prière et sans une prise de conscience permanente qu’il est avec nous, dans Ses frères, où Il a choisi d’habiter.
Un grand chantier nous attend pour améliorer nos programmes catéchétiques, les rendre plus présents aux problèmes auxquels nous sommes confrontés, et y utiliser un langage et des moyens éducatifs plus accessibles aux gens d’aujourd’hui.
b-    Pastorale des jeunes
Notre jeunesse est une richesse pour l’Eglise. Comme le dit l’Apôtre Paul à Timothée, nous devons les encourager à ne laisser ‘personne mépriser (leur) jeune âge’, mais à leur rappeler de se montrer ‘un modèle pour les croyants, par la parole, la conduite, la charité’ (1 Timothée 4 : 12) et le service. Nous devons les appeler à se mettre toujours plus au service de leurs frères et de l’Eglise, avec sérieux, esprit de sacrifice et engagement. Jésus aima le jeune homme riche et lui demanda beaucoup. Tout jeune est riche par ses charismes et son élan. Nous devons veiller à mettre à la disposition de nos jeunes, comme à celle de tous les autres fidèles, des endroits pour leurs réunions et leurs congrès. Nous devons encourager les rencontres entre  jeunes, dans l’espace antiochien, pour qu’ils manifestent l’unité de notre Patriarcat.
c-    Pastorale de la femme

Il est évident que les femmes ont de nombreux charismes particuliers qu’il faut exploiter pour les engager, seules et avec les hommes, dans la diaconie pastorale et le travail social. Le Nouveau Testament parle de femmes ayant servi l’Eglise de manières diverses. Durant l’ère apostolique, comme l’atteste Paul, il n’y avait dans la communauté chrétienne ‘ni homme ni femme, car tous (ne faisaient) qu’un dans le Christ Jésus, appartenant au Christ, donc de la descendance d'Abraham et héritiers selon la promesse’ (Galates 3 : 27-28). De nombreuses femmes ont suivi Jésus à travers Ses pérégrinations pour annoncer la Parole de Dieu. D’autres ont assisté les apôtres et servi la communauté. I l nous faut ouvrir un chantier de réflexion pour encourager une participation plus active des femmes dans le travail d’évangélisation et de service. Il nous faut aussi les consulter en tout ce qui touche à l’Eglise. Il nous faut être inventifs pour renforcer leur diaconie, en lui donnant des formes nouvelles, par exemple dans des fraternités vivant dans le monde, dans le monachisme et diverses activités éducatives et sociales.

d-    Pastorale de la famille

Notre monde vit une crise prônant l’individualisme et poussant les hommes à s’isoler de la vie de leur communauté. Quant à l’Eglise, elle enseigne que la famille est une pierre angulaire dans l’édification de la société humaine, car elle permet la communion et l’entraide entre ses membres tout en permettant à chacun d’affirmer sa personnalité. Nous devons donc œuvrer à préserver la famille, en assumant les programmes éducatifs et les activités qui la soutiennent, expérimentés avec succès, dans certains centres de préparation au mariage qui donnent aux fiancés un apport psychologique et pratique pour que leur union réussisse et puisse mener à l’éclosion de familles saines dans la société. Une famille réussie est une garantie pour une bonne éducation de nos enfants, une bonne formation de nos adolescents, l’éveil de nos jeunes à une vie faite de vraie communion.

e-    Pastorale des pauvres
    ‘J’ai eu faim et vous m’avez donné à manger ; J’ai eu soif et vous m’avez donné à boire ; J’étais étranger et vous m’avez accueilli ; J’étais nu et vous m’avez vêtu ; J’étais malade et vous m’avez visité ; J’étais en prison et vous êtes venu me voir’ (Matthieu 25 : 35-36).
    Nous devons nous habituer à chercher le Christ en tout homme, car chaque homme, mis par Dieu sur notre route, est notre ‘prochain’. En lui, le Christ se propose à nous. Où sommes-nous de cette préoccupation ? Quelle est la part du pauvre dans ce que nous possédons ? Autant de questions que chacun doit poser à sa conscience tout d’abord, puis à sa paroisse et au diocèse où il vit.
f-    Pastorale des handicapés

La plupart d’entre nous ne savent pas que certains de nos jeunes s’occupent, dans plus d’un diocèse, de sourds, de muets, d’aveugles et d’autres handicapés, et les intègrent à leur travail catéchétique. Ce sont là des initiatives d’avant-garde qu’il nous faut soutenir et généraliser dans tous les diocèses, d’autant plus que le nombre des handicapés ne fait malheureusement que croître de jour en jour.  Ces frères-là ont droit, en priorité, à notre sollicitude. Il faut que nos fidèles prennent conscience de l’importance de tels services et les encouragent.

g-    Connaître le vécu de nos fidèles pour mieux nous en occuper

Il semble qu’il existe comme un malentendu dans le sens donné à l’Eglise et à la ‘confession’ (Ta’ifa). qui a conduit diverses organisations, ayant vu récemment le jour, à parler au nom des orthodoxes. Nous comprenons les sentiments et les préoccupations qui les sous-tendent. Nous estimons à sa juste valeur le zèle de ceux qui veulent défendre les droits de leurs concitoyens. Mais, Il nous faut affirmer que nous sommes d’abord une Eglise, et non seulement une confession parmi d’autres. L’Eglise englobe la confession. Elle ne l’ignore guère et doit l’englober dans sa pastorale. Il faut donner davantage d’attention à la communauté qui forme le tissu social de notre Eglise, l’écouter, dialoguer avec elle, nous rendre compte de ses justes besoins, et persévérer dans nos efforts pour la conduire vers Dieu.

Les déplacements de population qui ont eu lieu, pour diverses raisons, durant les quelques dizaines d’années précédentes, au Liban, en Iraq et maintenant en Syrie, et l’émigration vers les pays de diaspora, ont causé un changement important dans la composition démographique de la plupart de nos diocèses. Nous ne pouvons pas ignorer ces développements. Nous devons les analyser dans le détail, par le moyen d’enquêtes scientifiques, pour connaître au mieux les endroits où vivent nos fidèles et sonder leurs opinions. Nous ferons cela de concert avec nos frères, les évêques de nos diocèses à l’étranger. Nous pourrons alors développer des programmes pastoraux adéquats, incluant la construction de nouvelles églises et centres sociaux.

Bien-aimés,

Dieu veut que nous soyons des serviteurs. Il nous en a donné l’exemple en lavant les pieds de Ses disciples, nous montrant comment doit être le ‘premier’ dans une communauté régie par l’amour. Il nous a aussi demandé, selon le récit de l’Evangile de Jean, d’être ‘un comme Lui et Son Père sont un’ (Jean 17 : 11). Notre diaconie envers vous sera vraie dans la mesure où elle sera basée sur la communion qui doit nous unir à tous les niveaux. Il est évident que nous croyons que cette communion a une dimension sacramentelle prenant sa source dans l’Eucharistie, mais elle doit se manifester dans des actes tangibles dans la vie de notre communauté comme dans son témoignage au monde.

6- Développer la vie monastique

‘Restez toujours joyeux. Priez sans cesse. En toute occasion rendez grâce’ (1 Thessaloniciens 5 : 16).

Le monachisme est en fait un retour à la vie de la communauté chrétienne primitive, dans l’assiduité à la prière, le partage des biens, la lutte contre les passions et le détachement de tout pour un attachement total aux commandements du Christ et leur application, pure et simple. Il veut mettre en pratique l’injonction du Seigneur au jeune homme riche : ‘Si tu veux être parfait, va vends ce que tu as et donne le aux pauvres, puis viens et suis-moi’ (Matthieu 19 : 21 ; Marc 10 : 21 ; Luc 18 : 22). Après que la vie monastique se soit pratiquement éteinte dans notre Patriarcat, qui avait été autrefois un de ses promoteurs, Dieu nous donné de la faire revivre, durant les dernières décennies, dans nombre de couvents. Nous avons le souci d’encourager ce genre de vie dans toute sa rigueur et selon les normes, pour que les moines et les moniales deviennent des exemples de vie dans le Christ, rappelant aux gens vivant dans le monde, qu’ils portent dans leurs prières continuelles devant le Trône de Dieu, les exigences d’une telle vie.

7- Notre patriarcat d’Antioche est un et unifié

    Sur le plan de notre vie interne, le Saint Synode est le symbole de l’unité antiochienne. Il est l’organe qui doit veiller à ce que tout se passe, dans nos diocèses, ‘avec décence et bon ordre’, selon ce que Dieu demande aux serviteurs de Sa Parole. Le Saint Synode est, dans l’unité, le lieu par excellence de la concertation, celui qui distingue les charismes des fidèles et les invite à les fructifier. En son sein doit se vivre en vérité l’amour des pères pour leurs enfants, en assurant la coopération et le dialogue. A cause de l’amour qui doit unir tous ses membres, le Saint Synode a devoir de tout contrôler, loin de toute complaisance, et de poser toute question susceptible d’améliorer le cheminement de l’Eglise.

    Nous n’aurons de cesse pour que chaque fidèle prenne conscience que l’Eglise est prête à profiter de son savoir, de son expérience et de ses talents dans la vie de la paroisse, comme dans le domaine ecclésial général. Notre mission, aujourd’hui, est d’éviter à nos fidèles toute tension entre leur appartenance ecclésiale et leur vie dans ce monde qu’ils sont appelés à sanctifier. Le peuple des fidèles, en tant que participant au sacerdoce royal de l’Eglise, doit se consacrer à ce travail divin qui consiste à éloigner le monde des vicissitudes de la sécularisation et à le rapprocher de Dieu. Pour cela, nous œuvrerons à raviver les aptitudes des personnes et des institutions pout mettre en valeur les illuminations dont Dieu nous a gratifiés, dans les domaines de la théologie, de la pensée, de la science, de la littérature ou des arts. Notre attention à l’histoire de notre Eglise et aux hommes qui l’ont marquée, n’a pour but que de nous rappeler leurs témoignages pour en être les continuateurs.

    Malgré les souffrances que nous vivons, aujourd’hui, nous prions pour qu’Antioche continue de témoigner, par l’ensemble de ses fidèles, de l’orthodoxie de sa foi et de son attachement à sa pensée traditionnelle, incarnée dans le réel.

8- Le monde orthodoxe contemporain

    L’Eglise d’Antioche a joué un rôle éminent dans l’histoire pour rapprocher les points de vue entre les Eglises orthodoxes. C’est pour cela que nous nous proposons de faire en sorte que notre Patriarcat continue à remplir ce rôle dans le concert actuel de ces Eglises. Nous voulons être un pont d’amour et de dialogue, pour que tous agissent d’un même esprit pour la gloire de Dieu et de Son Eglise Orthodoxe, une, sainte, catholique et apostolique. Nous soutiendrons, à cet égard, tous les efforts en vue de la convocation du ‘Grand et Saint Concile Orthodoxe’, dont la tenue, quand elle aura lieu, sera un véritable événement historique.

    Nous basant sur les apports de l’Institut saint Jean Damascène de Théologie, de l’Université de Balamand et d’autres centres de recherche, nous essayerons de formuler des réponses orthodoxes aux problèmes qui préoccupent l’homme contemporain : ceux qui ont trait à la bioéthique, les techniques de procréation, le clonage et autres sujets brûlants.  Nous avons la responsabilité de dialoguer sur ces sujets avec les autres Eglises Orthodoxes, afin de parvenir à une approche orthodoxe commune face à ces interpellations, qui aiderait nos fidèles à voir plus clair, dans un monde qui ne  cesse de leur poser des questions existentielles. Il ne fait aucun doute que le monde chrétien, dans son ensemble, attend de telles prises de position, vue l’importance qu’il donne à la pensée orthodoxe, à cause des liens étroits qu’elle a su maintenir avec la pensée de l’Eglise primitive et sa théologie.

9- Vers une union sacramentelle complète avec les autres chrétiens

    Nous sommes conscients, nous les antiochiens, de la blessure que les schismes entre les croyants, ont causé au Corps du Christ. Cette prise de conscience a poussé l’Eglise d’Antioche à participer continuellement, depuis des dizaines d’années, à toute tentative de dialogue pour dépasser les manquements humains qui empêchent la réunion des chrétiens. Nous resterons fidèles à cette politique de nos prédécesseurs. Je voudrais insister dans ce domaine sur l’importance du respect mutuel entre Eglises, loin de toute arrogance, faite d’anathématisation ou de prosélytisme. Je suis profondément convaincu que l’orthodoxie de la foi, sur laquelle nous basons toutes nos relations avec les autres Eglises, est un facteur de rapprochement et non de division.  Notre ancrage en elle ouvre devant nous une voie permettant de trouver, dans l’amour et l’humilité, des points communs qui rapprochent, tout en restant acquis à l’idée que tout différend qui ne touche pas à l’essence de la foi, est une richesse dans la diversité, qui n’affecte en rien notre approche commune du Christ.

    Dans cet ordre d’idées, nous espérons pouvoir mener à bonne fin ce qui reste à faire pour atteindre la pleine communion sacramentelle avec nos frères, membres des Eglises Orientales non Chalcédoniennes, sur la base des accords conclus à Chambésy, comme suite à un long processus de dialogue. Si nous y parvenons, nous offrirons au monde un exemple vivant de la sincérité de nos efforts en vue de l’unité, dans la fidélité au Christ. Nous voulons aussi confirmer que nous poursuivrons tous les dialogues avec les diverses Eglises orientales et occidentales, essayant d’y témoigner tout d’abord de notre amour et de notre disposition sans faille à travailler en commun pour manifester le visage de l’Epouse, qui est l’Eglise. A cet égard, il nous faut mentionner et souligner l’importance du témoignage de vie que les chrétiens peuvent faire en commun, pour manifester ensemble leur amour du monde, au nom de Jésus Christ. De plus, nous appellerons à plus de concertation entre les Eglises chrétiennes sur les divers problèmes posés par le monde contemporain, en vue de confirmer ce que nous avons envers eux de points communs,  qui seront perçus par l’homme d’aujourd’hui comme autant  de consolations venues de Dieu.


10- Dialogue des Religions

Ce que nous avons dit à propos de nos relations avec les autres Eglises chrétiennes vaut en grande partie pour nos relations avec les autres religions, surtout en ce temps où les religions sont utilisées pour classifier les humains et créer des discordes et des divisions. L’histoire du Patriarcat d’Antioche est remplie d’exemples refusant de tels procédés, car ils perturbent les relations entre les religions et celles des citoyens d’un même pays. L’Eglise d’Antioche a confirmé, depuis des siècles, qu’elle croit à la convivialité qu’elle a pratiquée à la mesure de ses moyens. Pour elle, l’homme est le sujet auquel s’intéressent toutes les religions. Elles doivent le convier à aimer, non seulement à accepter l’autre, et le convier à le servir, non seulement à prendre acte de son existence.

Notre Eglise continuera donc d’affirmer, comme par le passé, la nécessité du dialogue avec tous, sur la base du respect mutuel, de l’égalité et d’une acceptation aimante des différences. Membres d’une Eglise enracinée dans cet Orient, nous refusons tout repliement sur soi et toute ignorance de l’autre. Nous sommes adeptes de l’ouverture et de la coopération avec tous nos concitoyens, afin d’aider à résoudre nos problèmes nationaux, car nous avons beaucoup en commun.

L’ignorance que nous avons vis-à-vis de l’autre, et l’image qu’il plaît à certains de nous en faire, nous causent un grand dommage. C’est pour cela que nous appelons à une connaissance mutuelle objective, basée sur un vrai savoir, afin de balayer toutes les faussetés qui habitent les esprits. Une vie aimante est la meilleure voie pour dépasser l’ignorance réciproque qui amène la haine. L’homme de notre Orient, qui vit aujourd’hui des situations d’oppression et de souffrance, a besoin que toutes les forces du bien se mettent à son service. Il est donc nécessaire pour nous, quelle que soit notre appartenance religieuse, de joindre nos forces pour nous mettre ensemble à son service, munis de l’espérance que Dieu finira par essuyer toute larme des visages de ceux qui souffrent. Tels des serviteurs fidèles, Il nous comblera de Ses grâces, afin que notre rencontre avec l’autre se fasse dans l’amour qui effacera les séquelles de l’ignorance.

Il nous faut affirmer ici que nos frères et concitoyens musulmans ont une place particulière dans notre cœur et notre pensée. Notre relation avec eux dépasse la simple convivialité. Nous partageons avec eux tous les problèmes qui accompagnent le cheminement de nos patries vers le progrès et vers l’instauration d’une vie paisible pour leurs habitants. C’est avec eux que nous bâtissons l’avenir commun de nos enfants. Avec eux, nous ferons face aux dangers qui nous guettent. Nous œuvrerons à extirper tout esprit partisan ou arrogant, d’où qu’il vienne, car il peut miner notre présence commune sur cette terre et les possibilités d’y travailler ensemble  à son service. Nous lutterons en toute sincérité pour éliminer toute ignorance réciproque, en augmentant les occasions de rencontres constructives et en demandant à Dieu de nous remplir, tous, d’un esprit de concorde en vue du bien de la personne humaine dans nos pays.


11- Présence responsable envers l’homme et la société

    Les religions vivent de nos jours dans une société plurielle, ouverte à la nouveauté, d’où qu’elle vienne. L’utilisation des technologies  et la sécularisation y  ont réduit leurs champs d’action. Cela affecte forcément notre vision de notre rôle dans une telle société. En tant que chrétiens, nous refusons la sécularisation à outrance, car elle rend l’univers et le monde étrangers à leur Créateur. Mais, nous estimons, en même temps, que nous sommes appelés à transmettre l’amour du Créateur envers le monde, en toutes occasions, et à incarner cet amour  dans le service du monde. Pour nous, l’homme est créé à l’image de Dieu et à Sa ressemblance. Il est appelé à la divinisation, à cause de la grâce de l’Incarnation. Ces données de foi ont été transmises par Antioche à son milieu géographique, dès l’aube du christianisme. Nous sommes conscients qu’il faut considérer le comment de notre présence dans la société comme une partie intégrante de notre action ecclésiale.

    Le premier cercle sociétal qui nous concerne directement est celui du monde arabe. Nous sommes les fils de cet Orient et enracinés en lui, depuis les débuts du christianisme. Les apôtres y ont prêché. Les martyrs y ont donné leur sang. Les Pères y ont enseigné. C’est dans cet Orient que nous avons bâti, avec d’autres, une histoire humaine glorieuse. C’est d’ici que nous participerons à l’édification d’une culture universelle qui ne renie pas le passé, mais utilise ses trésors culturels pour préparer l’avenir. Nous, antiochiens, nous formons une partie constituante du tissu oriental. Notre rôle ne se mesure pas à notre nombre, mais sur la spiritualité  qui nous permettra de créer, avec d’autres, une culture dynamique, portant les marques de cet  Orient et de son héritage florissant. L’Orient a toujours donné à la société des possibilités de création et d’échanges culturels. Nous tâcherons de faire en sorte que cette approche continue d’être la marque de la présence orientale dans la civilisation mondiale.

Nous avons à cœur de transmettre le message de cet humanisme oriental aux autres sociétés, pour défendre la dignité des hommes, de tout homme. Dans une civilisation qui a chosifié l’homme, le considérant seulement comme un consommateur, nous sommes résolus à faire entendre au monde une voix authentique défendant l’homme, pour qui le Christ a été crucifié. Nous affirmerons cela avec d’autres. Nous collaborerons avec les âmes de bonne volonté, pour influencer les lois, mondiales et locales, qui régissent les diverses réalités éthiques, afin que la science ne nuise pas à l’homme et à l’univers, et que la modernité ne soit pas une occasion de nier l’existence humaine et son sacralité, ou de défigurer les relations des hommes entre eux.

L’attachement à l’authentique de notre pensée chrétienne, qui croit en l’homme et en son rôle constructif, pour le respect et la préservation de la création, nous donnera d’établir une rencontre positive avec la science, les idées et les arts.


12- Assumer les problèmes de la terre

    Nous devons de remarquer que, de nos jours,  les Etats, en tant qu’organisations politiques régissant les sociétés humaines, jouent un grand  rôle dans le développement sociétal et dans les relations entre les peuples. Pour assurer son témoignage dans le monde, l’Eglise doit se mettre au courant de ce qui se passe dans les sociétés de ce monde. Elle doit interpeler ces sociétés chaque fois qu’elles portent atteinte  à la dignité humaine, et aider de toutes ses forces, à instaurer dans ce monde, ce que les anges lui ont annoncé, le jour de la Nativité de l’Enfant Jésus, à savoir la joie et la paix.

    Nous sommes conscients que nous devons être dans le monde des apôtres de cette joie et de cette paix. Nous devons œuvrer, avec d’autres bonnes volontés, à ce que la paix prévale partout, sur la terre, où la violence pousse les hommes à quitter leurs pays ou à s’entretuer. Nous devons prier pour ces hommes afin que Dieu réduise leurs souffrances et leurs blessures, et amène leurs dirigeants à cesser toute belligérance. Nous devons aussi les aider pour ramener la joie dans leur cœur. En tant que chrétiens, nous sommes des agents de réconciliation et de rapprochement, car notre diaconie dans ce monde est un ‘ministère de réconciliation’ (2 Corinthiens 5 : 18). N’oublions jamais ce ministère.

    Notre souci de l’homme et de la responsabilité des Etats à lui assurer la liberté et le bien-être, s’applique tout autant à la création dans son ensemble. Notre monde a vécu, durant les dernières années, un recul écologique inégalé, dont les conséquences laissent présager une destruction de la vie humaine sur la terre. Notre Eglise a développé, il y a quelque temps, un programme écologique de préservation de la nature. Nous essaierons de le mettre en pratique, appelant à plus d’engagement pour l’écologie, car ‘la création entière’ est appelée à louer le Seigneur.


Conclusion

    Bien-aimés,

    Nous sommes une communauté vivant de la Résurrection, consciente que la grâce divine ‘complète les imparfaits’. C’est pourquoi nous avons confiance que nos défaillances, personnelles et communautaires, ne nous empêcheront pas de remplir la mission qui nous a été confiée. Je demande à Dieu de nous donner de poursuivre ces lignes directrices, qui doivent permettre à notre Siège Apostolique, de mener à bien les devoirs qui lui incombent, afin d’être témoin du Christ, dans cet Orient que nous aimons, et dans le monde.



    Demandons l’aide de Dieu, pour que
‘La grâce nous grandit,
le service nous élève,
et l’amour nous unit’
 Amen.


Le 17 février 2013

Youhanna X,
Patriarche d’Antioche et de tout l’Orient