Lettre Pastorale Noel 2012



2012-12-20

Par la grâce du Seigneur,

De la part de Jean X,

Patriarche d’Antioche et du Levant pour les Grecs Orthodoxes,

A l’attention de

Mes frères, pâtres de la Sainte Eglise d’Antioche

Et mes enfants dans tous les territoires de ce siège apostolique

    Ces fêtes de fin d’année nous retrouvent dans le tumulte causé par plusieurs tristes évènements, récemment survenus au sein et aux alentours de notre Eglise d’Antioche ; la perte du bien aimé père Ignace IV, paix à son âme, qui nous a guidés et a géré nos affaires courantes avec zèle et loyauté pendant plusieurs décennies tout d’abord. Son souvenir demeurera intact dans nos cœurs et nos esprits et subsistera éternellement auprès du Seigneur, qu’il a servi tout au long de sa vie.  Notre Eglise est également fort affectée par la situation tragique que connaît notre peuple en ce moment, en raison de la violence et de la tourmente qui sévissent dans la région.
 
    Le Saint Esprit m’a accordé la grâce d’être nommé par les Frères membres du saint synode à la succession du souverain pontife, malgré mon sentiment de ne pas être digne d’un tel honneur, mais je m’en remets à Dieu et compte sur vous, mes chers Frères et fils de notre Eglise, et cette confiance me porte à croire que la Providence nous permettra de surmonter ces difficultés et d’aller à l’encontre de jours meilleurs.
 
    Vous avez su, dans la tourmente de ces événements, m’insuffler la certitude de vous avoir vu affronter cette période difficile comme se doit de le faire peuple du Dieu vivant, qualité que vous avez exprimée à travers trois attitudes que vous avez adoptées : la profonde peine dont vous avez fait preuve lors des condoléances exprimées à l’égard de la perte du grand défunt ; la manière dont vous vous êtes adonnés à la prière, au jeûne et à l’espérance au cours de la période précédant l’élection ; et enfin la joie, la ferveur et la sérénité dont vous avez fait montre après l’élection. Tout cela me pousse à vous remercier aujourd’hui, à être fier de vous et à placer de grands espoirs dans le corps uni de notre Eglise.

    Aujourd’hui, voici l’Enfant qui nous est venu dans une étable pour mourir pour nous, afin de nous rappeler qu’Il est avec nous, qui nous parle, compte sur nous pour être porteurs du message de paix et d’amour qu’il a adressé à chacun de nous individuellement, mais aussi au monde entier. Il vient à nous en toute humilité, frappant aux portes de nos cœurs en douceur, comme s’il souhaitait y naître. La Nativité n’est pas seulement le souvenir de la naissance de Jésus dans la crèche de la sainte Vierge, Mère du Seigneur, mais aussi le rappel et la célébration de Sa naissance en nous, qui surviendra si chacun de nous aspire à la pureté de la Vierge Marie. La naissance de Jésus en nous doit, sans l’ombre d’un doute, nous pousser à renouveler le respect de Ses préceptes et notre quête d’être Son Eglise, sans tache ni faiblesse, mais pure et resplendissante, empreinte de Son Saint Esprit, afin qu’ensemble, nous soyons conscients que le Christ est notre mère, et que ses pâtres et ses croyants sont appelés à être ses messagers, invitant leurs frères dans le monde entier à se réconcilier entre eux et à rejeter la violence, pour que Sa paix règne.

    Le monde n’en sera convaincu que s’il se ressent fortement aimé des disciples de Jésus et qu’il ressent qu’ils sont ses serviteurs.

    L’Eglise est notre mère. Chacun de vous y est important et son rôle y est unique, primordial. Le devoir d’accompagnement inhérent au rôle de pâtre vous y a en effet été confié.  Quel que soit le niveau de sa mission, le pâtre se doit en effet de venir à vous, d’être à l’écoute de vos problèmes,  de chercher à vous aider à les résoudre et de répondre à vos questionnements fatidiques.

    En échange de votre observance de la parole de Dieu et de votre quête permanente de la prendre pour exemple, il est de votre droit également de prendre part au rôle consultatif et de contribuer à résoudre ses affaires, car il appartient à tous les fils de veiller, avec le maître de maison, à la destinée de la famille.   

    Cette fête nous retrouve alors que nombre des enfants de notre Eglise sont sans abri, loin de leur domicile, en souffrance. Notre devoir de frères est de les soutenir et de les réconforter, non seulement par le biais de moyens financiers et en leur assurant l’aide matérielle nécessaire, mais aussi en leur offrant notre attention, notre tendresse et notre amour.

    Cette fête nous retrouve aussi alors que nombreux, dans nos pays, se demandent ce qui les attend.

    Mes frères, l’Enfant de la crèche nous dit : n’ayez crainte, car je suis à vos côtés. N’ayez crainte, car vous êtes des frères, appelés à être solidaires  et à vous soutenir les uns les autres. N’ayez crainte, car vous êtes les habitants de ces pays, dans lesquels le Seigneur a souhaité que vous voyiez le jour, et ce depuis fort longtemps. N’ayez crainte, car vous y avez de nombreux frères comme vous, qui croient en l’Amour et à la possibilité de vivre ensemble en bonne entente.

    N’ayez crainte et ne vous réfugiez pas dans la rigidité, mais allez vers tous en toute affection et dans la joie, emplis de confiance en votre Seigneur qui est le Dieu de l’Amour, qui est Amour ; appelez à la réconciliation, appelez au dialogue en profondeur.

    Nous fêtons cette Nativité avec nos frères chrétiens. Nous prions pour que Dieu nous permette d’approfondir le dialogue avec chacun d’entre eux, pour que nous parvenions à l’unité que Dieu souhaite et sans laquelle le monde ne croirait pas que Jésus nous a été envoyé par le Père.

    Fêtons-la également avec nos frères musulmans, qui connaissent l’importance du Christ et reconnaissent sa naissance virginale par le biais de la Vierge Marie, telle que le Seigneur l’a souhaité. Cette fête nous est donc commune et nous pourrions la partager avec eux si nous savions dialoguer avec eux dans les règles du vivre ensemble et de la bonne entente, autour des concepts qui nous réunissent, sur le plan religieux comme séculier.

    Mes frères, agenouillez-vous devant l’Enfant qui a choisi de vivre en vous.
    Je ne peux que m’adresser ici à nos enfants qui se tournent vers nous depuis les différents pays où ils se trouvent, nos enfants dans le Golfe, en Europe, en Australie et dans les deux Amériques. Vous êtes dans mon cœur depuis que je vous ai rencontrés au cours de mes voyages et que vous ai connus à travers ma mission paroissiale. Vous êtes aujourd’hui l’expression authentique de la mission apostolique de l’Eglise d’Antioche dans les pays où vous résidez. Votre amour pour Antioche et votre vie consacrée à votre foi me forcent, aujourd’hui plus qu’hier, à veiller à ce que nous œuvrions tous, main dans la main, au service de l’Eglise, pour être la preuve vivante de notre amour et de notre unité.
    Ainsi, nous serions les dignes témoins du Seigneur en ce monde, et notre Eglise d’Antioche serait la gardienne fidèle de son histoire qui irradie de la lumière des saints et martyrs. Nous ne pouvons emprunter d’autre voie que celle de la sainteté, qui rend tout possible.

    Je vous transmets ma bénédiction apostolique et l’assurance que je porte chacun de vous dans mon cœur. Je prie le Seigneur d’être toujours son fidèle serviteur auprès de vous, et de nous permettre d’œuvrer toujours ensemble pour la gloire de Dieu en l’Homme qu’il a aimé et en l’Eglise qui porte son nom en ce bas monde.

    Issu de notre siège patriarcal à Damas, le 20 décembre de l’an 2012.